Le rapport 2025 de l’Assurance Maladie compare sept pays de l’OCDE sur les modèles de prise en charge des maladies chroniques. Entre financement, couverture ALD, parcours coordonnés et rôles des complémentaires, l’analyse révèle des forces, des limites — et met en lumière ce que la France pourrait (et devrait) apprendre des systèmes étrangers. Le fossé se creuse entre modèles de prise en charge et enjeux contemporains : prévention, multimorbidité, santé comportementale.
Contexte : un rapport 2025 en plein débats sur les prises en charge des maladies chroniques et les ALD
Début décembre 2025, l’Assurance Maladie publie un rapport comparatif intitulé « Modèles de prise en charge financière des patients atteints de pathologies chroniques ». Ce document analyse les dispositifs de prise en charge dans sept pays de l’OCDE : Allemagne, France, Italie, Royaume-Uni (Angleterre), Pays-Bas, Australie et Belgique.
L’enjeu est clair : face à l’augmentation des maladies chroniques, au vieillissement, à la pression sur les dépenses publiques, comprendre comment chaque système organise le financement, la couverture, la coordination des soins et la sécurité financière des patients.
Ce rapport s’inscrit dans le cadre plus large du rapport “Charges et Produits 2025” de l’Assurance Maladie, qui identifie les pathologies chroniques comme un des fils rouges pour agir sur la prévention, l’efficience des soins et la maîtrise des dépenses.
Trois modèles de prise en charge financière des maladies chroniques identifiés
Le rapport distingue trois grandes logiques parmi les systèmes étudiés :
- Modèle “pathologie reconnue / ALD” (clinique + réglementation) — France, Italie, Angleterre
- Modèle “capacité financière / reste à charge modulé” — Allemagne, Belgique
- Modèle “parcours de soins coordonnés + externalités” — Pays-Bas, Australie
Ce qu’en dit le rapport pour la France
- Le dispositif d’Affection de Longue Durée (ALD) reste le cadre central.
- L’accès dépend presque exclusivement de la reconnaissance réglementaire de la pathologie (critères biomédicaux, gravité, chronicité).
- Les parcours coordonnés et les aspects “prévention / accompagnement comportemental” sont moins valorisés, car non structurés dans le dispositif ALD.
Forces et limites du modèle français : ce que révèle l’analyse comparative
Le rapport met en lumière des approches plus souples ou plus adaptées aux défis modernes :
- Pays-Bas & Australie — parcours coordonnés et approche globale : prise en charge non pas seulement de la pathologie, mais du patient dans son environnement, intégrant prévention, soins primaires, coordination et suivi. Cela rend possible l’accompagnement durable des MNT.
- Allemagne & Belgique — partage du risque financier et solidarité mixte : le coût reste modulé selon la complémentaire ou la capacité financière, ce qui permet de maintenir un accès tout en limitant la charge publique, mais exige un équilibre entre solidarité et responsabilité individuelle.
- Royaume-Uni & Italie — reconnus pour l’exhaustivité des ALD, mais confrontés à des défis de coordination et de prévention : preuve que l’ALD seule ne garantit pas une prise en charge efficace à long terme.
Mais le modèle d’ALD montre ses limites face à la multimorbidité, à la prévention et aux déterminants sociaux
Les MNT actuelles ne sont plus des maladies isolées : ce sont des trajectoires, souvent polymorbides, sur lesquelles pèsent des déterminants sociaux, économiques, environnementaux, comportementaux.
Le rapport Assurance Maladie 2025 ne donne pas de solution à ce défi : le dispositif ALD n’a pas été conçu pour intégrer ces dimensions.
Le bilan Français sur la prise en charge des maladies chroniques selon l’Assurance Maladie
Les points forts
- Solidité du financement : le modèle ALD assure un remboursement à 100 % pour les pathologies reconnues, ce qui réduit fortement le reste à charge pour le patient.
- Clarté réglementaire : la reconnaissance des pathologies est formalisée, les critères sont clairs, ce qui sécurise les pratiques.
- Couverture large : via l’ALD, un nombre important de maladies chroniques est théoriquement couvert.
Les limites structurelles mises en évidence
- Rigidité du cadre : la prise en charge ne concerne que les pathologies “classiques” conformes aux critères ALD. Les préventions, soins non spécialisés, interventions comportementales, services de coordination n’ont pas de voie explicite de financement.
- Dépendance à la reconnaissance biomédicale : les maladies émergentes, les comorbidités, les trajectoires évolutives et les déterminants comportementaux restent mal couverts.
- Fragmentation des parcours : le modèle français repose souvent sur des soins discontinus — médecin, spécialiste, hôpital — sans coordination systématique, ce qui complique la gestion des MNT complexes.
- Reste à charge variable selon le complémentaire : même si la base est l’ALD, les soins périphériques, le non-médicamenteux ou les services non conventionnés peuvent retomber sur l’assuré ou sa mutuelle.
Ceci fragilise la capacité du système à gérer les comorbidités, la prévention, les soins non médicaux, l’éducation à la santé ou les soins de coordination — pourtant essentiels pour maîtriser le fardeau des MNT.
Quelques pistes de réforme inspirées des exemples européens
| Objectif | Proposition inspirée de l’étranger / recommandations internationales |
| Couverture des soins non-médicamenteux & prise en charge préventive | Créer un fonds de prise en charge préventive (éducation thérapeutique, sport santé, accompagnement comportemental), financé collectivement — comme en Australie ou aux Pays-Bas. |
| Coordination des soins & trajectoires complexes | Développer des parcours coordonnés (maison de santé, soins primaires + spécialiste + accompagnement), inspirés du modèle néerlandais. |
| Solidarité financière et équité | Harmoniser la couverture des complémentaires, garantir un accès universel sans dépendre uniquement de la capacité financière (modèle Allemagne/Belgique). |
| Données, évaluation & santé numérique | Exploiter le SNDS et les données de santé pour évaluer les interventions, suivre les trajectoires, mesurer l’impact des parcours coordonnés et de la prévention. |
FAQ
Quels sont les modèles de prise en charge des maladies chroniques identifiés en 2025 ?
Trois modèles : ALD (pathologie reconnue), financement modulé (capacité financière), parcours coordonnés + soins/prevention. L’Assurance Maladie+1
Le modèle français (ALD) est-il suffisant face aux défis actuels ?
Non. Il reste adapté aux maladies “classiques” mais peine à couvrir la multimorbidité, la prévention, les soins non-médicamenteux et les déterminants sociaux.
Quelles réformes structurelles semblent nécessaires ?
Mise en place de parcours coordonnés, fonds pour la prévention, meilleure intégration des données, harmonisation des complémentaires, approche hybride soins/prévention.
Le rapport 2025 peut-il orienter des politiques concrètes rapidement ?
Oui : il fournit des repères comparatifs, mais il faudra un volontarisme politique pour engager une nouvelle phase de transformation.
Bibliographie
Assurance Maladie. (2025). Modèles de prise en charge financière des patients atteints de pathologies chroniques – Comparaisons internationales n°8.
Assurance Maladie. (2024). Rapport Charges et Produits 2025.
Assurance Maladie. (2025). Cartographie 2015–2023 des pathologies et des dépenses en France.
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