Un score élevé de littératie en santé numérique augmente considérablement la capacité à naviguer dans les soins digitaux — de la prise de rendez-vous à la prévention en ligne. Si les enjeux de la littératie en santé sont connus, et que les limites liées à l’âge pour l’utilisation du numérique en santé le sont également, d’autres limites semblent apparaitre.
Une étude internationale publiée en 2025 dans le Journal of Medical Internet Research (Qiu et al., 2025) explore les facteurs associés à la littératie en santé numérique dans quatre pays européens (Royaume-Uni, Allemagne, Suède, Italie).
En s’appuyant sur une enquête transversale menée auprès de 6 298 adultes, les auteurs identifient des écarts notables selon l’âge, l’état de santé perçu et le pays de résidence. Ces résultats soulignent l’importance d’intégrer des logiques comportementales et de design inclusif dans le développement des politiques de santé numérique.
Peut-on vraiment augmenter la littératie en santé via le numérique ?
La transition vers des systèmes de santé de plus en plus numérisés pose un défi d’accessibilité cognitivo-informationnelle. La littératie en santé numérique – entendue comme la capacité à rechercher, comprendre et utiliser l’information de santé en ligne – constitue un déterminant critique de l’accès équitable aux soins. L’étude de Qiu et al. (2025) examine les variables sociodémographiques et contextuelles qui influencent cette capacité.
Parmi les informations à retenir :
- Les +55 ans sont les moins équipés tandis que les jeunes adultes (25–44 ans) performent le mieux.
- Une association positive a été observée entre la santé perçue et la littératie numérique. Les individus se déclarant en très bonne santé obtiennent un score moyen supérieur de 2,3 points par rapport à ceux qui se considèrent en mauvaise santé. Ces résultats suggèrent que les personnes les plus vulnérables médicalement sont également les moins outillées pour bénéficier des dispositifs numériques.
- Les participants suédois et britanniques présentent des scores significativement plus élevés que les répondants allemands (référence). L’effet pays est estimé à +2,9 pour la Suède et +2,1 pour le Royaume-Uni. Cela reflète l’influence des politiques publiques et du degré de maturité des systèmes de santé numériques nationaux.
Pas d’impacts du sexe et de l’origine ethnique
D’après les résultats de l’étude, le sexe et l’origine ethnique auto-déclarée ne sont pas associés significativement au score de littératie. Toutefois, une réserve méthodologique subsiste, car plus d’un tiers des répondants ont omis ou refusé de renseigner leur appartenance ethnique.
Des adaptations nécessaires
Ces résultats mettent en évidence des disparités d’accès cognitif au numérique en santé. Le vieillissement de la population, l’état de santé auto-évalué et l’environnement sociopolitique apparaissent comme des leviers majeurs à considérer. La littératie numérique en santé devient ainsi un marqueur de vulnérabilité qui s’ajoute aux inégalités sociales classiques.
En termes d’implications pratiques, plusieurs leviers inspirés des sciences comportementales peuvent être mobilisés :
- La simplification des interfaces pour les publics moins familiers,
- L’utilisation de rappels visuels et d’incitations douces (nudges) pour encourager l’action,
- La valorisation des usages numériques via la norme sociale et le témoignage,
- Le développement d’outils d’accompagnement différenciés selon l’âge et l’état de santé perçu.