largement le domaine médical. Elle constitue également un enjeu économique et social majeur pour le monde du travail. Les salariés, les employeurs et les finances publiques sont directement affectés par les conséquences de cette maladie chronique, qui connaît une progression continue en France et en Europe.
Dans cet article, nous allons explorer les répercussions de l’obésité au travail sur la productivité, l’emploi, les inégalités professionnelles et les coûts socio-économiques, tout en identifiant des pistes d’action pour les entreprises et les pouvoirs publics.
L’obésité : une charge croissante pour l’économie et le travail
En 2024, l’obésité a représenté près de 9 milliards d’euros de coûts pour la société française, un chiffre qui inclut les dépenses liées aux soins, à la perte de revenus des salariés et aux surcoûts pour les employeurs. Si le coût médical direct de la maladie est estimé à 10,9 milliards d’euros, son poids économique sur le marché du travail atteint presque le même niveau.
Ces pertes se traduisent concrètement par :
- 1 milliard d’euros de pertes de production pour les employeurs, liées à l’absentéisme, l’invalidité et les décès prématurés de salariés en âge de travailler ;
- 4,1 milliards d’euros de pertes de revenus pour les patients, qui subissent à la fois une santé fragilisée et une moindre stabilité professionnelle ;
- 3,8 milliards d’euros de dépenses publiques (aides sociales, indemnités d’invalidité, prise en charge de l’Assurance Maladie).
Ces chiffres révèlent une réalité souvent sous-estimée : l’obésité n’est pas seulement un problème de santé, c’est aussi un facteur d’affaiblissement économique pour les entreprises et la collectivité.
Obésité au travail et absentéisme : une productivité réduite
L’un des effets les plus visibles de l’obésité sur le marché du travail est l’augmentation de l’absentéisme. Les personnes en situation d’obésité sont davantage exposées à des maladies chroniques (diabète de type 2, maladies cardiovasculaires, troubles musculo-squelettiques) qui entraînent des arrêts de travail plus fréquents et plus longs.
Pour un employeur, cela signifie une baisse directe de la productivité, une désorganisation des équipes et parfois des coûts supplémentaires liés au remplacement temporaire des salariés absents. Au niveau national, cette baisse de productivité est estimée à plusieurs centaines de millions d’euros chaque année.
Inégalités et discriminations : la double peine pour les femmes
L’étude révèle un constat particulièrement préoccupant : l’obésité au travail touche plus durement les femmes.
- Plus de 273 000 femmes en âge de travailler seraient privées d’emploi en raison de leur poids.
- Pour celles qui travaillent, les discriminations salariales sont réelles : elles perçoivent en moyenne 396 € nets de moins par an que les autres salariées.
- Au total, la perte de revenus liés à l’obésité pour les femmes atteint 2,6 milliards d’euros par an.
Au-delà des coûts économiques, il s’agit d’une atteinte à l’égalité professionnelle. Ces chiffres soulignent combien le poids peut devenir un facteur de discrimination dans l’embauche, l’évolution de carrière et la rémunération, accentuant ainsi des inégalités déjà existantes.
Une tendance inquiétante pour les prochaines années
Si rien n’est fait, la situation risque de s’aggraver. D’ici 2030, le coût médico-socio-économique de l’obésité pourrait dépasser 23 milliards d’euros en France.
Cela signifie que l’impact de l’obésité au travail ne se limite pas au présent : c’est une bombe à retardement pour l’économie et la société. La croissance continue du nombre de personnes en surpoids ou obèses annonce des répercussions de plus en plus lourdes pour les entreprises, les finances publiques et la cohésion sociale.
Comment les entreprises peuvent agir ?
Face à ce constat, les employeurs ne sont pas impuissants. Ils ont un rôle clé à jouer dans la prévention et la gestion de l’obésité au travail. Plusieurs actions concrètes peuvent être mises en place :
- Promouvoir la santé au travail : mise en place de programmes de bien-être (activité physique, ateliers nutrition, ergonomie des postes de travail).
- Encourager l’équilibre vie professionnelle – vie personnelle : limiter le stress chronique et les horaires irréguliers qui favorisent les déséquilibres alimentaires et la sédentarité.
- Lutter contre la stigmatisation : instaurer une culture d’entreprise inclusive et sensibiliser les managers aux risques de discrimination liés au poids.
- Offrir un accompagnement personnalisé : proposer des bilans de santé réguliers et des programmes adaptés aux salariés concernés.
Ces mesures, si elles demandent un investissement initial, peuvent générer un retour sur investissement important en réduisant l’absentéisme et en améliorant l’engagement des collaborateurs.
Le rôle des pouvoirs publics : prévenir plutôt que subir
Les entreprises ne peuvent pas agir seules. Les pouvoirs publics doivent également renforcer leurs politiques de prévention, afin de freiner la progression de l’obésité. Cela passe par :
- Une meilleure éducation nutritionnelle dès le plus jeune âge ;
- Des campagnes de sensibilisation aux comportements de santé (alimentation, activité physique, sommeil) ;
- Une régulation plus stricte de l’offre alimentaire ultra-transformée et de la publicité ciblant les jeunes ;
- Le soutien à des programmes d’accompagnement pour les personnes déjà concernées par l’obésité.
Ces politiques publiques ont un double objectif : protéger la santé des citoyens et préserver la compétitivité du marché du travail.
Conclusion : l’obésité au travail, un défi collectif
L’obésité au travail ne peut plus être considérée comme une problématique individuelle. Elle affecte directement la performance des entreprises, les revenus des salariés et l’équilibre économique de la société.
Les chiffres sont sans appel : près de 9 milliards d’euros par an aujourd’hui, et plus de 23 milliards d’euros attendus d’ici 2030 si aucune mesure n’est prise.
Répondre à ce défi nécessite une mobilisation conjointe des entreprises, des pouvoirs publics et de la société civile. La prévention, la lutte contre les discriminations et la promotion de la santé doivent devenir des priorités. Car au-delà des coûts, c’est bien la qualité de vie au travail et l’avenir du marché de l’emploi qui sont en jeu.